Roulent les nuages et les vents nouveaux.
Les paysages, les visages défilent.
Les courants marins changent de direction sous les glaciers fragiles…
Roulent les voitures à toute allure…
Que serons-nous tout à l’heure?
Roulent les graines stériles plantées dans les champs sacrifiés.
Que serons-nous tout à l’heure?
Calotte glaciaire fondue sous des crânes endormis?
Accélération du temps,
triomphe du logo.
Produire, produire.
Retrouves-moi, oeuf de départ,
phare instinctif.
Le naufrageur est là, diffus et accepté.
A chaque page de pub, dans chaque foyer.
Comme si nous n’allions jamais mourir…
Je veux être la sève.
Le couloir secret de la chlorophylle.
Le pollen volant sous le ventre des abeilles.
L’odeur de l’iode dans la brise marine.
L’arbre fier et droit qui se dresse pour durer.
La rivière lumineuse dans les bois victorieux.
L’aurore.
La rosée.
L’oiseau libre du décors.
La Nature ne fait pas la guerre.
Elle se contente.
Fallait-il tant s’engraisser ?
Dresser la nappe phréatique et manger des nitrates.
Faire un semblant de mea culpa.
Boire coca-cola, le sot soda, les plats prêts de Marie…le cul-cul collé au fauteuil?
Big bang.
Clic, clac, clefs sous la porte.
Je pars de l’ autre côté pour ne jamais revenir
dans le grand gang-bang du marché.
J’ai le droit de ce luxe.
Je pars du côté des animaux cachés,
des signes obscurs et de l’éclair chatoyant des couleurs.
Je pars voguer sur les mers verticales de l’éthique,
hurlant, chantant mon désir dilué dans le ciel.
Je pars presque seule et loin de tout langage,
dans le silence complice des profondeurs picturales.
A mille années-lumière : presque rien.
Mais encore trop proche du constat.
Une panne?
Est-ce une panne?
Ou un nouveau départ?
Casser de la phrase.
Manger l’encre.
Découper les mots.
Dessiner chaque lettre.
Entendre le clavier de l’ ordinateur rappeler le présent.
Ici, maintenant.
Ça continue sous les doigts, le désir.
Le désir de vivre.
Le désir de manger l’océan.
Le désir d’avaler le ciel.
Le désir d’être.
Le désir du désir.
Le désir de marcher sous la pluie battante.
Rire sous l’orage.
Nager.
Sourire au vent.
Pieds nus sur l’herbe humide.
Je veux rouler dans les bras de la Nature.
Ma mère éternelle.
Dans le ventre de la terre, j’entends gronder :
« Rendez-moi mon corps!! »
Et le corps à corps.
Corps à corps avec n’importe quel sujet pourvu qu’il y ait enfin :
un style.
Chaque lettre est un brin d’herbe brûlé sur l’étendue blanche de la page,
la griffe d’un fauve assis,
la marque du sabre.
Mais :
il n’y a jamais eu de samouraï.
Juste le regard d’ enfants blessés.
Inaliénables.
Une seule liberté:
celle de choisir de qui ou quoi on va dépendre.